dimanche 7 novembre 2021

FIAC, leurs premières fois

Qu’ils soient galeristes ou artistes, ils exposent pour la première fois à la FIAC. On est allé dénicher certains de ces nouveaux arrivants dont les structures ou les peintures témoignent de l’air du temps.

Adoubés

Il y a 4 ans, j’entrais dans un ancien restaurant désaffecté transformé en lieu d’exposition tenu par une jeune femme à la parole concise et engagée. En quelque sorte un nouveau format de galerie d’art contemporain, qui balbutiait encore ses ambitions et cherchait à décrocher le modèle porteur d’un métier en mutation, celui de galeriste. En apparence, il avait le visage d’un pop-up du fait de son caractère nomade, prêt à investir n’importe quel lieu, pourvu qu’il ait du caractère et la place pour monter une exposition. A l’époque, je ne m’étais pas posé la question de savoir si ce type de concept hybride pouvait être présenté à la FIAC, et du reste, je me serais sûrement dit qu’il était trop précurseur ou trop éloigné de la ligne de la foire. Mais cette année, en regardant la liste des galeries exposées, je remarque son nom dans le secteur Jeunes Galeries : Sans titre (2016). Et je constate qu’il s’est désormais amarré à un domicile fixe au cœur de Paris, au 33 rue du Faubourg Saint-Martin, se rapprochant de fait de la forme d’une galerie d’art. De même, pour son homologue Exo Exo qui fait coup double sur la foire. Une première pour la galerie et pour l’artiste qu’elle présente dans un solo-show – si l’on ne compte pas la FIAC OVR (Online Viewing Rooms) de mars dernier. Pourtant, il y a encore quelques années, rien ne présageait qu’elle puisse être adoubée par le comité de sélection de la FIAC. Elisa Ricochet, sa directrice, aime raconter l’histoire singulière de ce qu’elle a longtemps nommé son project space, c’est-à-dire un lieu d’exposition spontané qui ne se pense pas en galerie d’art traditionnelle mais affiche librement ses choix esthétiques, entièrement voire volontairement détachés des contraintes du marché. Un lieu expérimental et rassembleur, baromètre d’une vision de l’art décalée et avant-gardiste, loin du vacarme des salles de ventes et des foires, quelque part au fond d’une cour, sur la pente douce de la colline de Belleville. De grandes baies vitrées et des murs en brique. En 2012, quand l’aventure prend forme dans l’atelier de l’artiste Antoine Donzeaud, ce type de lieu alternatif n’existe pas à Paris. Elisa et Antoine exposent des artistes jeunes et inconnus, souvent leurs amis. Ils font ce qu’on appelle aujourd’hui de la curation, terme étrange, presque barbare à l’époque, avant de devenir le vocable coqueluche de l’art contemporain. Le projet s’ébruite, les choix d’Exo Exo sont remarqués au point qu’Elisa se rend compte que plusieurs artistes qu’elle avait découverts poursuivent leur chemin en galerie. C’est le déclic : « En 2017, il y a eu un tournant. On s’est posé la question d’être une galerie, c’est-à-dire travailler avec moins d’artistes et plus en profondeur. On s’est donc recentré pour ne représenter que des artistes basés en France mais notre ligne est restée la même : toujours travailler avec des nouveaux artistes qui n’ont jamais été montrés, ni à Paris, ni en France. On défriche, même dans les écoles. » Un tournant oui, mais de là à se projeter sur la FIAC ? Elisa le dit sans ambages : « Nous n’avons pas le temps ni l’économie pour faire foire sur foire, nous devons cibler. Nous n’avons jamais envisagé Art Paris, mais nous avons fait Artorama fin août et nous avons immédiatement pensé à la la FIAC », qu’elle considère comme une carte majeure en termes de visibilité et de progression.

Troublante féminité

Pari réussi avec la jeune Cecilia Granara, fraîchement diplômée des Beaux-Arts de Paris et du Hunter College de New York. Exo Exo lui offre sa première exposition personnelle en 2019 et en parallèle la jeune femme participe à plusieurs expositions collectives. « Une belle énergie » selon Elisa. A la FIAC, le solo-show de Cecilia prendra la forme d’une grande chorégraphie visuelle. On pourra découvrir les lignes ondulantes de sa peinture qui fécondent des corps féminins solaires dont l’acidité sulfureuse des couleurs leur procure une dimension aussi spirituelle que charnelle. Nés de la pulsion du désir ou de l’or d’une divinité ancestrale ? Impossible de savoir. Le regard se délecte et s’angoisse à la fois. Assurément, il reste accroché à ces formes symboliques, presqu’éthérées parfois, troublantes métamorphoses se fixant dans notre rétine, comme des idoles. La jeune artiste, prometteuse, attise déjà l’intérêt de collectionneurs, et même majoritairement de collectionneuses. 

Intimités d’hier et d’aujourd’hui

Trentenaire comme Cecilia Granara, Jean Claracq bénéficie aussi d’une exposition à la FIAC mais au musée Delacroix, dans le cadre du parcours Hors-les-Murs. Sous l’égide de la galerie Sultana qui le représente, ses tableaux figuratifs dialogueront avec l’intimité de l’atelier du peintre du XIXe siècle. S’il a été très remarqué au moment de sa première exposition personnelle à la galerie en 2021 et lors d’une carte blanche « Open Space » réalisée à la Fondation Louis Vuitton, la galerie ne s’attendait pas à cette invitation lancée par la FIAC. Ce coup de projecteur correspond au moment que l’on vit actuellement, « celui de la peinture » commente-t-elle. On imagine déjà, dans la pénombre de la maison de Delacroix, les petits formats de l’artiste, peintures à l’huile minutieuses, sur bois, dont le glacis très lisse crée un effet de brillance moderne, presque pop, contrastant avec l’atmosphère très construite et mélancolique de ses scènes de genre contemporaines, habitées de jeunes gens d’aujourd’hui. Une esthétique qui emprunte aussi à l’art de la miniature et à la patience des maîtres flamands. L’exposition devrait tourner autour d’œuvres de Delacroix évoquant des décors et des constructions. 

Fragments de nostalgie

Les œuvres d’un autre jeune artiste auquel est également dédié un solo-show témoignent de l’orientation vers le figuratif qui s’esquisse dans plusieurs créations actuelles. Jousse Entreprise dévoile les peintures de Simon Martin, douces et nostalgiques, sentinelles subtiles de fragments de choses et de souvenirs, figées dans un temps rêvé, celui des réminiscences fragmentaires que notre esprit retrouve parfois. Les tâches de couleurs pastel, scintillantes, s’abreuvent de lumière blanche et évoquent le jaillissement de flashs mémoriels.

Ces coups de projecteur loin d’être exhaustifs ne doivent pas occulter un panorama plus large de l’émergence, dont les pépites se trouvent aussi chez Georges-Philippe & Nathalie Vallois avec Lucie Picandet et Pierre Seinturier, chez Poggi avec l’Ukrainien Nikita Kadam montré dans une exposition collective notamment aux côtés de Kapwani Kiwanga (Prix Marcel Duchamp 2020) ou encore chez Edouard Montassut avec les œuvres de l’Allemande Nora Kapfer. 


lundi 24 mai 2021

Maître et élève, la transmission à l'oeuvre au Collège des Bernardins

Dans le grand réfectoire du Collège des Bernardins, je retrouve l'artiste plasticienne et professeure à l'Ecole des Beaux-Arts, Anne Rochette. L'oeil sage et attentif, l'allure digne et élégante, elle dégage une sensation de stabilité et inspire une confiance immédiate. Je me dis que cette femme qui enseigne depuis de longues années la matière mystérieuse de l'art semble avoir ce double pouvoir de transmettre et de laisser le jeune artiste se libérer afin de trouver son propre chemin. Car le sujet est bien là. Anne Rochette a accepté de monter une exposition avec deux de ses anciens élèves, Gwendoline Perrigueux et Cyril Zarcone. Trois œuvres qui habitent actuellement la sacristie du Collège des Bernardins, magnifique salle voûtée où la présence de la spiritualité aide à trouver des résonances et des signes intimes. Le son s'y déploie, les formes aussi sous la vertigineuse hauteur sous plafond tandis que les solides colonnes ramènent tout un chacun à l'ancrage dans la terre des ancêtres. 

Le titre de l'exposition "Il est plus beau d'éclairer que de briller seulement" est une phrase du philosophe et théologien Saint Thomas d'Aquin qui se poursuit ainsi : "de même est-il plus beau de transmettre aux autres ce qu'on a contemplé que de contempler seulement". La délicate question de la transmission de maître à l'élève est au cœur de cette exposition. Est-il véritablement possible de voir dans les œuvres des deux élèves d'Anne Rochette un lien avec sa propre création ? Peut-on voir dans l'élégante installation de Gwendoline Perrigueux, suspendue sous les voûtes du plafond de la sacristie, où le métal semble plus léger que l'air, ou bien dans la grande colonnade de Cyril Zarcone, une filiation avec les énigmatiques personnages de grès de Anne Rochette ? Pour éclairer nos interrogations, Anne Rochette nous explique comment l'exposition s'est construite, naturellement, sans rapport cette fois de maître à élève, mais plutôt d'artiste à artiste car ici, on n'est plus dans l'atelier d'Anne Rochette à l'Ecole des Beaux-Arts, mais hors-les-murs. 

Il y a probablement un intérêt particulier aux matériaux, aux volumes dans l'espace, au travail du corps dans les trois œuvres, un intérêt qu'Anne Rochette enseigne, transmet, dans son atelier de sculpture à l'Ecole des Beaux-Arts dont elle nous explique le fonctionnement qui met l'accent sur le collectif, le regard et les observations communes sur le travail des uns des autres. Mais comment déceler l'empreinte de l'enseignant dans le travail de l'élève. Très difficile. Le travail artistique est aussi une affaire personnelle. Anne Rochette rappelle qu'elle ne mélange pas sa pratique d'artiste avec sa pratique d'enseignante. Pour justement laisser une plus grande liberté à l'artiste en devenir. Mais alors, en tant qu'artiste, qui est-elle ? L'exposition du Collège des Bernardins, qui présente des sculptures de personnages masqués, nous en fournit quelques clefs. 

Anne Rochette nous précise également que lorsqu'elle est arrivée en poste à l'Ecole des Beaux-Arts, il y a 20 ans, la place de la femme était peu visible, voire presque inexistante au sein du corps enseignant, une expérience qui a marqué sa carrière de professeure mais aussi d'artiste et qui a probablement infusé dans sa manière de transmettre un savoir à ses élèves... Et être artiste aujourd'hui, est-ce plus difficile qu'avant ? oui, assure-t-elle. Anne Rochette regrette aussi que la pédagogie de l'art ne soit pas enseignée en France. 

"Il est plus beau d'éclairer que de briller seulement", une exposition à voir et à réfléchir autour de la question de la transmission de l'art, du rapport de maître à l'élève, du mystère qui lie les anciennes références et les pratiques nouvelles. Sous le commissariat de Sophie Monjeret, également ancienne étudiante à l'Ecole des Beaux-Arts de Paris, cette exposition est à découvrir dans la sacristie du Collège des Bernardins jusqu'au 15 décembre. Une occasion d'interroger la question de la transmission dans l'enseignement aujourd'hui. A noter que l'atelier d'Anne Rochette pourra se visiter sur inscription le 29 novembre 2019 à 17h pour découvrir les travaux de ses étudiants. 


mercredi 26 juin 2019

Vincent Bioulès, Primitif moderne


Vincent Bioulès, Donnafugata, huile sur toile, 2016, 150x200

Je ne connaissais pas particulièrement la peinture de Vincent Bioulès avant de découvrir la rétrospective que lui consacre actuellement le musée Fabre de Montpellier. Tout au plus avais-je peut-être croisé quelques-uns de ces tableaux en reproduction, notamment ses paysages, dont certains sont très connus.

Or immédiatement, la visite de l’exposition m’a procuré un sentiment de réjouissance, de plaisir. Plus je regardais, plus je me délectais de la matière, des couleurs, de la lumière et plus j’avais la sensation d’entrer dans une immense toile aux variations infinies, comme si, sur les chemins de Bioulès, se déclinaient à la fois le souvenir de tableaux aimés de l’ancienne peinture médiévale, les premières constructions de paysages d’un Giotto ou d’un Pisanello, mêlées à quelques réminiscences de vitraux ou de tapisseries millefiori, et l’évolution vers la modernité depuis la période plus affirmée, très construite, raisonnée, d’un Piero della Francesca et d’un Fra Angelico (peintre admiré par Bioulès), jusqu’au regard avant-gardiste et pur de Matisse. Mais étrangement, dans cette grande traversée, les paysages de Bioulès ne regardent que peu l’impressionnisme. Car finalement, l’artiste aime le radical, l’aplat, le dessin, la ligne, le contour même. Plus proche d’un Marquet que d’un Monet, plus métaphysique que sentimental, Bioulès peint certes sur le motif, mais y ajoute une dimension spirituelle, presqu’irréaliste, campant parfois des formes très simples, proches d’un vocabulaire naïf, et donne ainsi à certaines toiles une beauté physique, primitive, arcadienne même. L’idée d’un idéal perdu, d’un ailleurs intérieur, à la frontière entre réalité et fantasme, comme Giorgio Bassani a pu rêver en littérature le jardin des Finzi Contini.

Des toiles en quelque sorte déconstruites pour mieux renaître avec la consistance d’une longue imprégnation, d’une longue compréhension de ce que peut être l’idée de représentation, comme si chaque tableau me parlait tout à coup d’une question fondamentale de peinture, que ce soit le paysage, la fenêtre, le portrait, l’absence de figuration même. Oui, l’absence de figuration, j’insiste sur cette expression, car j’ai aussi eu la sensation profonde que Vincent Bioulès n’a jamais été un peintre abstrait, malgré ce qui a été dit souvent à son sujet. Ses grands monochromes m’ont plutôt semblé être une expérimentation, un passage obligé, le désir de repousser les limites, et non d’anéantir, pour mieux retrouver « une autre possible figuration » selon l’expression du peintre. Et ce sentiment de plaisir s’est déployé de toiles en toiles dans lesquelles je plongeais, pour ne plus les quitter. Que ce soit, les fenêtres des débuts, plutôt classiques, mais aux couleurs si profondes et belles, très matissiennes, ou les immenses monochromes, mers de couleurs primaires, paradoxales exubérances minimalistes ; le peintre ici fait allégeance en cherchant comment trouver dans ce qu’il aime, son propre chemin esthétique.

La fenêtre sera toujours la sienne, celle de son enfance ou de l’âge adulte, celle qu’il côtoie, qu’il regarde chaque jour, au point de sublimer un grand marronnier qui devient, selon ses propres termes, « une rupture ». Il le dessine puis le déconstruit, le fait s’évanouir, se morceler, tend même, peut-être avec un certain humour, à le faire ressembler aux motifs de son ami de l’époque, Claude Viallat. Le marronnier agit comme un moteur, un déclic et comme signifiant d’une nouvelle peinture, personnelle cette fois. Bioulès dit avoir trouvé ici son territoire. Comment l’expliquer ? Une question de ressenti. Le marronnier est toutefois toujours dans la fenêtre. La fenêtre, le cadre, suivra tout le parcours de l’artiste jusqu’à aujourd’hui. Elle apparaît très albertienne dans les références assumées aux Primitifs italiens. Lorsque Bioulès peint la place d’Aix à plusieurs reprises, les tons du fond sont plutôt sombres, voire noirs (il peint aussi une Nocturne à Céret), pour mieux faire surgir, comme une grammaire figurative, des fenêtres de lumière. L’idée est belle, moderne, inventive et reflète un amour inconditionnel de la peinture, au sens de la composition picturale, dans ce qu’elle peut révéler de mystérieux, d’ésotérique. C’est ce plaisir hédoniste que le peintre a pu ressentir enfant devant un Fra Angelico (le bleu que l’on retrouve souvent chez lui, est évidemment le bleu de la méditerranée mais peut être aussi celui, pastel, de ce grand peintre italien). Ce désir enfoui dans la représentation, il le peint avec délicatesse pour en suggérer le pouvoir. Les initiés, ceux qui aiment la peinture, verront que les stylisations des motifs, à l’instar de symboles, agissent comme une codification secrète, bien gardée, posée dans ce sas étrange entre amour de la couleur et sacralité de la lumière.

Lorsqu’on s’approche des grands paysages, tout est abstrait, et par l’effet du recul, tout devient une prouesse de figuration et de construction. Au centre, souvent, comme une démarcation, la ligne d’horizon semble faire réfléchir le ciel et la terre, le rêve et la réalité, comme un miroir qui vient souligner une ambivalence, des pulsions opposées, métaphore peut-être de l’opposition floue, ou plutôt de la complétude originelle mais oubliée, qui a toujours existé entre abstraction et figuration. Aucun manichéisme, malgré les apparences, mais beaucoup d’intuition.

Son dernier tableau est dans ce sens un des plus révélateurs de la physicalité que le peintre cherche à nous faire ressentir. La matière tellurique semble la nature elle-même, on y perçoit l’énergie corporelle de l’artiste au travail, on y décèle la matérialité des éléments, du « cosmos » comme il aime à dire. Une peinture qui rappelle avec force les tons et les expressions de Courbet, dont le musée Fabre conserve justement à quelques mètres plusieurs chefs-d’oeuvre. C’est peut-être à travers cette synthèse du figuratif et de l’abstrait que Bioulès arrive à nous émouvoir autant. En s’enracinant lui-même, corps et âme, dans les profondeurs inouïes de son art.

Le 26 juin 2019, après ma visite de l'exposition "Vincent Bioulès, chemins de traverse" à voir jusqu'au 6 octobre 2019 au musée Fabre de Montpellier et à l'Hôtel de Cabrères-Sabatier d'Espeyran.

mardi 4 juin 2019

Les mondes perdus de Vanessa Fanuele


 
Presque éternité V, huile sur toile 120 x 145 cm, 2018

Étrangement, les œuvres de Vanessa Fanuele nous ramènent à une singulière atemporalité, instinctive, ou pourrait-on dire, à une certaine idée d’origines perdues, ces premiers temps nichés dans les arcanes obscures de notre mémoire collective, dont on a tous des images assez classiques qui prennent la forme de terres nourricières, de chaos énigmatiques, de premiers hommes debout...La nature y est omniprésente, en couleurs éclatantes, grossièrement jetées, par effet de superposition et de transparence, qui composent des tableaux lumineux où s’évanouit l’apparition discrète d’un corps humain solitaire, rapidement croqué dans un aplat d’ocre pâle, comme pour en souligner l’insignifiance. Des tableaux qui se déploient parfois en fresque composées de plusieurs panneaux peints et d’où émergent, en surface, des gouttelettes de peinture ou des coulures volontaires, laissées ici avec légèreté pour en faire ressentir la matérialité pigmentaire, à l’instar des flous pastel et humides de Bonnard. Vanessa Fanuele revendique cet héritage des avant-gardes, ces premières modernités picturales qui ont posé leur regard sur la décomposition des formes et de la lumière, ces papiers découpés de Matisse dont on retrouve parfois la trame colorée chez l’artiste. Mais qui dit modernité, dit aussi abandon, nostalgie, perdition, lorsque le temps décide de faire son œuvre. C’est alors le prisme du souvenir, de la reconstitution mentale, qui entre en jeu et c’est peut-être ce cheminement rétro-temporel que les œuvres de Fanuele nous invitent à faire, devant ces éclats intenses de couleurs joyeuses qui dessinent des forêts vierges de toute intervention humaine, devant ces images dont nous avons un jour rêvé dans notre lit d’enfant, devant ces étranges paysages crépusculaires, où seul le rayon lunaire semble avoir droit de citer pour éclairer des architectures de fêtes foraines abandonnées brillantes de feux oubliés. Souvenirs peut-être d’un cinéma hollywoodien rythmé par les hypnotiques plans-séquences de Michael Mann quand le bleu nuit s’habille de nostalgie, comme dans la peinture de jeux d’enfants que nous livre l’artiste sur fond de grands pins maritimes un peu romantiques. Ici, émerge la mémoire des utopies jadis rêvées par le Bauhaus et Le Corbusier, discernables à travers les enchevêtrements de lignes où s’animent de frêles modulors solitaires qui s’emploient à ériger les premières constructions de l’histoire. Echo inconscient de l’artiste à ses études d’architecture ?

L'éternel retour, huile sur toile, 150 x120, 2019

A notre tour de plonger dans ces mondes perdus, paradis sauvages ou nuits de modernité évanescentes, dans ces flous, ces esquisses de structures, sous les fragiles lanternes du cinéma californien, quelque part entre le rose acidulé et le jaune clinquant, bientôt pâlis par le temps, quelque part dans une atmosphère singulière à la Peter Doig, quelque part dans les compositions barrées d’une bande jaune translucide évoquant l’ancienne pellicule photographique ou le filtre du songe.

Se remémorer, comme l’artiste a pu le faire après la disparition de sa grand-mère, lorsqu’elle ouvrit quelques boîtes qui lui avaient appartenu. C’est en découvrant ces choses secrètes d’une vie vécue qu’elle décida de devenir peintre, entièrement. Une manière peut-être d’exprimer par la peinture des passages, des visions, qui ont petit à petit pris la forme de tropiques mélancoliques. On ressent ce sentiment d’état originel dans l’Eternel Retour, grande toile inondée de mousson où transparaît un champ de coton sur fond de forêt amazonienne, peuplée par quelques esclaves d’autrefois. Lévi-Strauss aurait pu en livrer un texte inspiré. Cette notion de passage se fait moins sociologique et plus contemplative dans l’installation en trois dimensions imaginée par l’artiste, petit théâtre aux contours enfantins dans ses couleurs et ses éléments architecturés. Tel un conte, un voyage où la silhouette brune d’un Petit Prince, ici une fillette, nous tourne le dos pour regarder vers le soleil couchant à l’horizon. Il n’est pas anodin de dire que l’artiste revient, elle aussi à un état premier, celui de l’enfance, pour mettre en scène l’innocence retrouvée. Et se peindre discrètement.

Le 29 mai 2019, après ma visite de l’exposition « Eclats sauvages » à la Galerie Polaris. Vanessa Fanuele expose actuellement au Mini Château d'Eurre à Saoû dans la Drôme dans le cadre Sillon-Itinéraire Art Drôme qui rassemble 35 artistes sur un parcours de 40 km. Du 30 mai au 16 juin.

lundi 29 avril 2019

Pencréac'h, sur le motif de la mémoire


Cela aurait pu être des peintures sur le motif, aplats de couleurs et traits spontanés où s’esquissent de manière virtuose des paysages et des scènes de la vie quotidienne. Les œuvres de Pencréac’h sont bien sur le motif, mais le motif de la mémoire, la mémoire de son enfance qu’il réactive comme aurait pu le faire un Raoul Dufy face à la mer, un Gauguin sur ses vieux jours, un Matisse s’il était parti tâter de la terre africaine. Mais après tout, si peindre sur le motif est la retranscription d’un instantané, c’est aussi beaucoup de sensations et de souvenirs mêlés venus à l’appui d’une représentation figurative très personnelle. Sa nouvelle exposition galerie Vallois s’appelle Danané, du nom du village africain où il passe quelques années de son enfance alors qu’il a sept ans, l’âge de raison, l’âge où l’on commence à ressentir et expérimenter soi-même les choses de la vie. Ce sont justement les flashs et les impressions enfouis dans sa mémoire d’enfant que l’artiste est allé rechercher pour réactiver des visions et des souvenirs qui ont marqué sa sensibilité et ont forcément participé à la construction de son âme d’adulte. 

A la manière d’un voyage mémoriel aux contours un peu flous, voici la terre ocre dans toutes les œuvres, peintures et sculptures en regard, dans un jeu de correspondances des matières et des formes, voici les gouttes de pluie qu’il a sûrement senties sur son visage, les insectes tropicaux qu’il a observés de près, peut-être disséqués, les routes terreuses et les ponts de liane peu solides, les sensations de l’humidité et de la sécheresse sur son corps. Formes, silhouettes, images, odeurs, tout ce qui est resté figé, souvent des gros plans, peut-être obsessionnels, comme c’est souvent le cas pour les souvenirs d’enfance que l’on a en nous et dont on se rappelle la nuit ou dans les moments de pause de notre existence, tout ce qui a fini par créer cet assemblage d’images diverses où la nature tient une place particulière, la nature et les gens de ce village africain auxquels Pencréac’h se sent attaché au plus profond de lui-même, plus qu’il ne l’aurait peut-être imaginé. Le plus touchant est cette capacité à renoncer à toute dimension intellectuelle ou théorique de l’art – à laquelle l’artiste nous a pourtant habitué depuis plusieurs années en aimant intégrer dans ses créations des citations à l’histoire de l’art ou à l’actualité qui nous entoure – cette capacité à allier dans une fécondité nourricière le support et la matière - huile, toile, panneaux de bois, terre cuite, arrêtes de poisson, morceaux de liane…- pour créer plus que des œuvres d’art, de réelles reliques d’un passé retrouvé, comme si chaque œuvre était un peu de cette Afrique aimée, à l’instar de cet album photo qui n’a jamais existé où aurait pu être capté ce qui a un peu hanté Pencréac’h et ce qui l’a beaucoup fasciné : araignées, singes, cafards, libellules, brousse… 

Aujourd’hui, ces réminiscences surgissent dans une peinture plus primitive, sans fard. Pencréac’h recrée ainsi un morceau de son histoire personnelle dont il n’a que des embryons, mais qui est surtout un petit pan de l’histoire familiale, au point que sa mère, en voyant une unique photographie de la famille datant de cette époque, discrètement intégrée à une peinture, en a les larmes aux yeux. Débarrassé de toutes connivences intellectuelles, l’artiste peint ici ce qu’on peut appeler de manière un peu consensuelle un retour aux sources, ou bien plutôt une mise à nu. 

Paris, le 13 avril 2019 
Exposition du 6 au 30 avril 2019

mardi 29 janvier 2019

Pablo Valbuena investit le 104

Lorsque je demande à Pablo Valbuena de me citer une ambiance musicale qu'il aime, il me répond immédiatement 4'33 de John Cage, avec un sourire, à savoir 4'33 de silence, préférant sans doute intimement le son à la musique, deux choses entretenant selon lui peu de liens. Le son ne peut être dissocié de la réalité. La musique, si, et nous embarque même vers des contrées imaginaires. Or, l'artiste est somme toute très pragmatique. Sérieux même. Son discours s'accorde à son attitude, les deux sont impeccables, enrobés d'une vision analytique digne d'un ingénieur ou d'une chercheur en physique. Et il embraye en me parlant de "musique concrète" qu'on pourrait aussi nommer "acoustique", le chant des sons en quelques sortes, celui qui rythme notre réalité et qu'il utilise minutieusement dans ses immenses installations lumineuses et sonores. Artiste ou architecte, designer ou magicien, que veut nous dire Pablo Valbuena à travers ses lignes lumineuses, qui s'apparentent à des tracés de plans d'architecte ou, pour les plus complexes, à d'obscures algorithmes ?

En France, il s'est déjà fait remarquer avec son installation Gyrotope créée sur l'emplacement de la future ligne 15 du Grand Paris Express. En 2014, il a aussi fait sensation avec Kinematope, autre installation éphémère lumineuse que l'on pouvait voir sur le futur quai de la gare d'Austerlitz alors en travaux. A chaque fois, l'artiste, qui est diplômé de l'école d'Architecture de Madrid, joue avec l'espace qu'il vient souligner à l'aide de lignes et de points lumineux. Notre perception de l'architecture en est bouleversée et l'on croirait par moment entrer dans un espace animé par des lignes vectorielles de jeux vidéos. Le lieu où nous sommes bien ancré semble vouloir nous tromper, comme si nous revivions à l'infini un bref moment de notre présence au temps présent... Son exposition au 104 s'appelle d'ailleurs "Si le temps est un lieu".

Voyage du réel au virtuel et du virtuel au réel, l'artiste nous incite à traverser des espaces peuplés de formes géométriques et de stations lumineuses minimalistes. Le tout dessine un espace mental nouveau. Au début de l'exposition, Pablo Valbuena convoque l'idée d'infini à l'aide d'une mosaïque en carrelage dont le dessin géométrique en noir et blanc peut être changé de multiples fois. Un peu plus loin, derrière un rideau, on entre dans une pièce obscure où sont projetées sur les murs des variations lumineuses en mouvement qui changent au fur et à mesure du temps qui passe. D'autres salles exposent des vidéos d'oeuvres réalisées à travers le monde ou des projets jamais aboutis. Si l'on a plutôt l'habitude de voir des artistes illuminer l'espace urbain ou les architectures, il est moins fréquent d'assister à une correspondance entre lumière et son, quand le son n'est pas seulement un habillage esthétique mais bien une composante de notre réalité.

Ainsi sur un escalier ou dans les espaces de circulation d'un musée, Pablo Valbuena recrée, ou plutôt souligne, une réalité qu'on a oubliée, celle de nos pas, celle de notre présence physique. Il nous réapprend à la sentir, à l'expérimenter. Ses installations sont avant tout des expériences. Alors si vous allez au 104 à Paris voir l'exposition Si le temps est un lieu, présentée jusqu'au 24 mars, oubliez tout ce que vous savez et ressentez. Les oeuvres de Pablo Valbuena vont vous emmener dans un autre monde spatio-temporel. Et préférez la nuit tombante pour voir s'éclairer la cour du 104.

Les fausses confidences de Picasso

En 1951, sort, dans sa version originale italienne, le Livre Noir de Giovanni Papini, écrivain florentin proche du mouvement futuriste, fondateur de nombreuses revues intellectuelles. Anti-clérical à ses débuts, ce personnage fantasque est connu pour ses positions idéologiques nihilistes qui vont progressivement le mener à se fourvoyer dans le fascisme. Très controversé, il sera du même coup rapidement discrédité après la Seconde Guerre mondiale. Pourtant, un de ses écrits a connu une fortune mémorable, favorisé par un scandale retentissant.

L'énergumène produit un recueil de textes dans lequel il met en scène un certain Gog, personnage absolument détestable, qui ne croit plus en rien et se complaît dans une vision du monde où trône la médiocrité humaine. Ce Gog cinglant, désabusé de tout, part cependant parcourir le monde, voyageur anti-héros et anti-prophète, qui croise au détour de son périple plusieurs personnalités dont il recueille les confessions. Confessions purement imaginaires évidemment, mais qui reflètent la pensée iconoclaste de l'auteur. 

Le roman satirique s'appelle Le Livre Noir. Il sort en français en 1953 chez Flammarion. Dans la marmite piquante de Papini, sont assaisonnés Molotov et Hitler, Marconi et Valéry, Picasso et Dali, monstres modernes... chacun à leur manière.

On est presque dix ans après l'exposition organisée au Palais de Tokyo en 1944, intitulée Le Salon de la Libération, et qui présentait alors des œuvres d'art interdites par les Nazis, qui les avaient classées sous la dénomination d'"art dégénéré". A cette occasion, on pouvait voir 74 peintures et 5 sculptures de Picasso. Des œuvres qui suscitent un véritable scandale chez les critiques et dans la presse, au point que la Préfecture de Paris doit poster des gendarmes devant ces affreux tableaux pour éviter qu'ils ne soient vandalisés. 

L'art d'avant-garde de Picasso, banni par le nazisme, n'est, paradoxalement, pas bien accueilli non plus par ses contemporains, un rejet qui n'est pas totalement étranger au fait que le peintre adhère la même année au Parti Communiste. 

Picasso et Papini ont le même âge, nés tous les deux en 1881. Ils s'étaient rencontrés en 1912. Ils entretiennent un temps de bonnes relations, mais l'ombre du fascisme sépare à jamais les deux hommes. Papini écrira tout de même une Histoire de la littérature italienne qu'il dédie à Mussolini !
Picasso ne le sait pas encore, mais il est loin d'en avoir fini avec ce vieil ami qui a croisé le diable. Dans le Livre Noir, en effet, Gog, alias Papini, recueille une confession à charge pour le peintre qui se dit "amuseur public, qui a compris son temps et qui a exploité de son mieux l'imbécilité, la vanité et l'avidité de ses contemporains". Pire, Picasso avoue que l'art est "chose moribonde, condamnée, et que la soi-disant activité artistique dans son abondance même n'est que la multiforme manifestation de son agonie"!

Comment Picasso aurait pu dire cela ? Évidemment, tout est faux, Gog, la rencontre avec Picasso à Antibes, cette confession...Mais beaucoup y ont cru...

Déjà malmené par des propos durs sur son art après l'exposition de 1944, Picasso aura bien du mal à se remettre de ce texte dénigrant. De là, est née une vague anti-picassienne très résistante qui s'est notamment focalisée sur la dernière période de l'artiste dans laquelle les détracteurs dénoncent barbouillages incompréhensibles, déformations de la figure, délires érotiques...Une pensée, basée sur une fausse confession, qui a eu malheureusement la vie dure. A plusieurs reprises, le texte de Papini fut repris pour alimenter, souvent à des fins politiques, le discrédit d'un Picasso communiste qui n'a pas les idées claires, anti-franquiste gênant du point de vue espagnol et anti-Kroutchev trop affirmé pour les Soviétiques. Bref, le scandale Papini ne servit qu'à véhiculer de fausses informations qui ternirent l'art vrai du peintre, qui heureusement, lui, a survécu, d'une manière éclatante.

vendredi 18 janvier 2019

Les artistes se réapproprient l'art textile



Avec l'interview de Julie Crenn

L'exposition Soft Power au Centre d'art contemporain Transpalette à Bourges rassemble 26 artistes de plusieurs nationalités qui pratiquent tous ce qu'on appelle l'art textile à travers une pluralités de mediums. Broderie, couture, tricot, crochet, quilting, les œuvres posent toutes la question de la valeur de l'artisanat dans notre société moderne, mais au-delà, l'exposition se penche sur la question de la réappropriation des pratiques et des techniques textiles par l'expression artistique. Une réappropriation qui a été menée dans un premier temps par des artistes femmes, engagées, féministes. L'exposition conçue par la commissaire indépendante Julie Crenn est selon ses propres mots, "une digestion d'un travail de thèse", et par là, une exposition très personnelle pour la jeune femme.

La proposition nous permet d'appréhender l'art textile avec un regard plus large et plus critique. On découvre le travail de deux pionnières féministes, Hessie et Raymonde Arcier, des oubliées de l'histoire de l'art, ou celui de l’Égyptienne Ghada Amer qui, lorsqu'elle prend conscience de son statut de femme artiste, décide de le revendiquer en créant des œuvres mêlant peinture et broderie. Ici, il est question de libération et de courage, dont le travail minutieux et incessant de la matière textile est la métaphore. Le textile a bien quelque chose de persistant, de tenace même, sous une apparence de fragilité. L'exposition chemine dans le temps en montrant aussi des oeuvres de jeunes artistes engagés comme les portraits en habits de carnaval de Raphaël Barontini qui parlent de la libération du corps et de la confusion des genres ou l'étrange statue totémique aux allures de mannequin magique de l'artiste indienne Rina Banerjee. L'oeuvre de Shadi Ghadirian, photographe iranienne devenue célèbre avec ses portraits de femmes intégralement voilées dont les visages sont remplacés par des ustensiles de cuisine, recourt à une mise en scène simple, presque caricaturale, pour que le message soit encore plus fort. Trois grandes thématiques traversent cette exposition : l'histoire de la libération des corps, notamment les corps noirs, l'expérience de l'exil et de la migration et l'engagement féministe dans la création textile. Une exposition dont la réflexion est aussi politique explique Julie Crenn.  Autobiographique aussi. Chaque artiste nous raconte en effet sa propre histoire. Julie Crenn avait déjà appréhendé cette ouverture artistique en s'intéressant au travail de Frida Kahlo. Plusieurs artistes nous racontent leur exil, leur trajet d'un pays à l'autre, leur déracinement et chaque oeuvre revêt une charge émotive qui implique le regardeur. Ainsi, l'artiste coréenne Kimsooja nous raconte en vidéo son nomadisme en évoquant en filigrane la situation de plusieurs artistes actuels, exilés volontaires ou politiques. Dans sa vidéo-performance visible dans l'exposition, issue d'une résidence d'artiste qu'elle avait faite au MAC/VAL de Vitry-sur-Seine en 2007, elle rassemble sur son chemin, dans son pick-up, des balluchons, comme autant d'histoires de diverses communautés qu'elle croise sur son passage. L'exil, oui, impossible de ne pas en parler...

Des sculptures textiles du jeune Jérémie Gobé qui émerge sur la scène artistique à celle plus connues de la superstar de l'art textile Joana Vasconcelos qui avait eu droit à une exposition personnelle au château de Versailles, la première pour une femme artiste, l'exposition Soft Power de Julie Crenn s'inscrit aussi dans une tendance, celle d'un regain d'intérêt chez les artistes pour les techniques artisanales dont la résistance, au sens propre comme au figuré, ne peut être négligée.

L'exposition Soft Power, ou la réappropiration des techniques textiles par les artistes est encore visibles jusqu'au 19 janvier au centre d'art contemporain Transpalette de Bourges, du mercredi au samedi de 14h à 19h. Vous pourrez également rencontrer les artistes Aurélie Ferruel et Florentine Guédon, ainsi que Jérémie Godé samedi 19 janvier, jour de clôture de l'exposition.